L’Union Européenne cherche enfin à renforcer sa compétitivité
EXCELLIS International – Les décideurs souhaitent réformer l’économie stagnante de l’Union Européenne par une réduction de la réglementation et une augmentation des investissements.
Début septembre, un rapport critique sur la politique économique de l’Union Européenne a été publié par l’ancien président de la Banque centrale européenne, Mario Draghi, intitulé « L’avenir de la compétitivité européenne ». Ce document avertit que l’Union Européenne fait face à un déclin de croissance économique à long terme, menaçant sa prospérité, son indépendance et son modèle de bien-être social.
Pour remédier à ces vulnérabilités, le rapport de près de 400 pages préconise de réduire les dépendances géopolitiques en sécurisant les chaînes d’approvisionnement et en comblant l’écart d’innovation avec les États-Unis et la Chine. Sur le plan politique, ces objectifs seraient atteints via des réformes sectorielles, incluant le développement des industries de l’énergie, de l’intelligence artificielle, des transports et des produits pharmaceutiques. M. Draghi propose également des mesures transversales pour stimuler l’innovation, les compétences et la gouvernance.
L’investissement massif de l’Union Européenne comme clé de la croissance
Le rapport souligne l’ampleur des financements nécessaires pour atteindre les ambitions de productivité et de croissance souhaitées. M. Draghi estime que l’Union Européenne doit mobiliser des investissements publics et privés supplémentaires de 750 à 800 milliards d’euros par an, soit environ 5 % du PIB actuel du bloc. Cet effort d’investissement atteindrait des niveaux comparables à ceux des années 1960 et 1970.
M. Draghi promeut aussi des politiques pour réduire la bureaucratie et encourager une réglementation allégée. Le rapport propose notamment de réformer le droit de la concurrence pour mieux exploiter les bénéfices des fusions axées sur l’innovation. Les nouvelles règles de concurrence permettraient aussi la consolidation de certains secteurs comme les télécoms et les technologies de l’information. En parallèle, des efforts pour améliorer l’efficacité des marchés de capitaux, cruciaux pour financer les investissements nécessaires, seraient poursuivis grâce à l’Union des marchés de capitaux et à la centralisation de la supervision des marchés au niveau de l’Union Européenne.
Lors de la présentation de son rapport, M. Draghi a mis en garde : « Les raisons d’une réponse unifiée n’ont jamais été aussi impératives – et c’est dans notre unité que nous trouverons la force de réformer… Faute de quoi, ce sera une lente agonie. »
La Commission européenne recentrée sur la compétitivité
La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a également souligné l’importance de la compétitivité en commentant le rapport de M. Draghi. Elle a déclaré : « Pour être compétitifs, nous devons maîtriser la transition écologique et numérique… mobiliser les investissements publics et privés, améliorer l’environnement des affaires et réduire les formalités administratives superflues. »
Dans son propre rapport de juillet, « Le Choix de l’Europe », elle a précisé que la compétitivité serait la priorité de son prochain mandat de cinq ans après sa réélection. Elle a également soutenu la nécessité de rendre les affaires « plus simples et plus rapides en Europe ».
Afin d’atteindre ces objectifs, de nouveaux commissaires seront chargés de réduire les charges administratives et de simplifier les règles liées aux affaires. Les commissaires tiendront régulièrement des dialogues avec les entreprises pour superviser la mise en œuvre des politiques. Un représentant de l’Union Européenne pour la mise en œuvre et la simplification testera toutes les législations européennes en termes de conformité avec les intérêts des entreprises.
Les futures réglementations devront être simplifiées et conçues pour prendre en compte les petites entreprises. Un nouveau dispositif de vérification des PME et de la compétitivité aidera à éviter des charges administratives inutiles.
Imposer des obligations administratives aux entreprises dans l’Union Européenne
La directive sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité, adoptée en juillet 2024, imposera des exigences de diligence raisonnable aux grandes entreprises opérant dans l’Union Européenne en matière de droits de l’homme et de l’environnement. Cette directive s’ajoutera à d’autres obligations européennes, comme les réglementations sur les minerais de conflit, les batteries et la déforestation, et une future loi sur le travail forcé.
Face aux critiques, l’Union Européenne est soumise à des pressions pour ralentir l’application de cette directive, jugée trop lourde pour les entreprises. Le risque réside dans la possibilité que les États membres transposent ces obligations en droit national de manière opaque, rendant les règles peu claires pour les entreprises.
Un cadre législatif à alléger pour renforcer la compétitivité Européenne
M. Draghi voit également des opportunités de simplification dans la législation environnementale. Le règlement de taxonomie pour des investissements durables, qui est entré en vigueur en janvier 2022, impose aux entreprises de nouvelles exigences de reporting en matière de durabilité. Du point de vue des entreprises, ces nouvelles exigences impliquent des investissements importants pour collecter et fournir des données environnementales, une tâche auparavant secondaire.
Les entreprises s’inquiètent également du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières, qui entrera en vigueur en 2026 et imposera des charges financières sur les biens importés en fonction de leurs émissions de carbone.
Des lois numériques récentes limitent la compétitivité technologique de l’Union Européenne
La loi européenne sur l’intelligence artificielle, entrée en vigueur en août 2024, impose des catégories de risques aux fournisseurs de systèmes d’IA, obligeant les entreprises à se conformer à des exigences supplémentaires. Le Digital Services Act (DSA) impose des obligations étendues aux grands fournisseurs de plateformes en ligne et d’engins de recherche, suscitant des préoccupations sur son impact bureaucratique pour les entreprises numériques et sur l’innovation.
Scénarios possibles
Scénario plus probable : La nouvelle Commission européenne injecte de la compétitivité dans la législation
Les déclarations de Mme von der Leyen et de M. Draghi posent les bases pour une Commission plus favorable aux entreprises dans les cinq années à venir. La tendance pourrait être de simplifier la législation existante, ce qui encouragerait un environnement plus favorable aux affaires.
Scénario moins probable : La politique de l’Union Européenne reste entravée par une réglementation rigide
Malgré les appels de M. Draghi à accroître les investissements et à alléger la réglementation, les défis structurels de l’Union Européenne pourraient persister. Si l’Allemagne, principale économie de l’Union Européenne, continue de renforcer son cadre réglementaire, il pourrait devenir difficile de voir émerger un environnement moins restrictif dans le marché unique.
En conclusion, l’Union Européenne devra naviguer entre les impératifs de compétitivité économique, de transition verte et de sécurité sociale pour réussir à équilibrer croissance économique et responsabilité sociale.